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Sauvez
Willy (Promis, juré, je ne l’ai pas cherchée…) |
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Je
me présente : Pascal, 47 ans, transporteur, amateur de
vieilles
choses. Alfonse XI disait : « brûlez de vieux bois, lisez
de vieux livres, buvez de vieux vins, ayez de vieux amis ».
J’essaie de suivre, au plus près, cette devise.
Du
point de vue automobile, j’ai deux marques de prédilection :
Jaguar et … Citroën.
J’ai,
dans l’ordre d’arrivée au garage :
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une AK 350 de 1964, trouvée au fond d’une grange
lors de l’achat, par ma belle-sœur, d’une vieille maison
bourgeoise (la maison, pas ma belle-sœur) dans les landes
girondines. Cette AK 350 était une première main,
l’arrière a été découpé à la sauvage par l’ancien
propriétaire, sylviculteur, qui en avait fait un pick-up
pour transporter son matériel dans les bois. Le matériel
restait à l’abri car ce monsieur avait mis une tonnelle
plastique pour recouvrir l’arrière. J’ai fait restaurer
cette voiture au Maroc et ai fait remplacer la tonnelle
plastique par une bâche façon Méhari
-
Une XJ12 de 1985, je sais, ce n’est pas si vieux
que cela, mais il s’agit encore d’une « Série ». Cette
Jaguar, quasi-première main car le vendeur en était
propriétaire depuis 1986 avait besoin de quelques frais
pour la remettre à niveau, ce qui fut fait sur plusieurs
années (peinture complète, fiabilisation, climatisation…)
-
Une ID 19P confort de 1963, achetée en parfait
état à un mécanicien qui l’avait lui-même sortie de grange
et stockée quelques années plus tôt. La remise en état fut
faite à ma demande et j’ai pu en surveiller les travaux
-
Une XJC de 1975, achetée non roulante, remisée
pendant près de quinze ans, voiture qu’on pourrait
qualifier de « mûre », blanche avec son intérieur en cuir
rouge ce qui m’a valu le surnom de « Puff Pascal ». Cette
XJC a été restaurée intégralement elle aussi au Maroc
-
Une SM carbu de 1971, intérieur cuir mais sans
climatisation, en cours de réfection totale mécanique et
hydraulique depuis quelques mois
Voici
pour les présentations. Revenons-en à ce qui nous réunit ici :
le break DS.
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Il
a fait froid cet hiver, mais nous avons tout de même eu de
belles
journées. Suffisamment belles pour que les fumeurs, il en
reste
encore, puissent, après le repas, se noircir les poumons au
soleil
du mois de février.
Quel
rapport avec les cachalots me direz-vous ? Revenons
quelques mois en arrière.
Un
ami, Pascal, citroëniste et jaguariste convaincu lui aussi,
sort
d’une lourde intervention chirurgicale, il est à la maison
pour
plusieurs mois. Avec un ami commun, nous prenons rendez-vous
chaque
vendredi afin de ne pas abandonner notre Pascal en détresse.
Chaque
semaine nous essayons de lui remonter le moral et de lui
changer les
idées. Nous ne venons pas les mains vides. Soit nous nous
arrêtons
prendre un repas à emporter, soit nous amenons le meilleur
anti-dépresseur ou calmant connu : j’ai nommé le Médoc. Je
me permettrais de citer Thierry, membre éminent du club
Amicale XJ
dont je fais partie qui aura eu cette bonne phrase : « les
médocs ne remplaceront jamais un bon Médoc ».
Ces
repas sont toujours conviviaux, quelques fois l’épouse de
Pascal
se joint à nous, quelques fois elle en profite pour nous
laisser
Pascal et sa dernière fille qui a tout juste quelques
semaines. Ces
repas sont souvent aussi perturbés par un remue-ménage, en
effet,
pour loger sa famille nombreuse, Pascal est en plein
agrandissement
de sa maison et les artisans se succèdent sans arrêt du matin
au
soir. Certains travaillent dur, d’autres discutent sévère.
Et
voilà, pendant que nous prenons le soleil près de la XJ de
Pascal
accompagnant notre ami qui se raccourcit la vie cigarette
après
cigarette, un plombier-chauffagiste peu inspiré par ses
soudures ou
autres raccords nous rejoint, s’immisce dans la conversation,
joue
l’incruste et nous explique qu’il connaît une grange dans
laquelle il reste encore deux Citroën DS (dont un break), une
Vespa
400 et une quantité inimaginable de pièces détachées de toute
sorte.
Bref,
cet après-midi sera à noter dans les annales. La nouvelle
salle de
bains de l’épouse de Pascal n’aura pas beaucoup avancé, la
bouteille de Médoc n’aura pas suffit et, même rentré au
bureau,
la tête ne fut pas au travail.
Dès
le lendemain, nous en savons un peu plus. Je dis « nous »
car l’ami Pascal n’est pas insensible au charme de la Vespa
400.
Ces voitures sont stockées dans une grange, elles
appartiennent à
un ancien garagiste retraité depuis de longues années et, aux
dires
de notre plombier-chauffagiste, ces automobiles méritent un
léger
voile de peinture. L’épouse du garagiste pousse afin de
libérer
un maximum de place.
Le
rendez-vous est pris pour un prochain week-end.
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Pascal
et moi nous rendons donc dans la grande banlieue bordelaise,
accompagnés de notre artisan chargé de nous présenter aux
éventuels vendeurs. Le garagiste est extrêmement âgé. Il
gardait
ces voitures pour sa retraite mais, les années et la maladie
aidant,
il n’a jamais eu le temps de les remettre en marche. Son
épouse
nous accompagne dans la grange et là, grosse déception : ce
qui nous a été décrit comme des véhicules méritant un léger
voile, sont en fait trois épaves rouillées, accidentées et mal
stockées. Poliment, nous continuons la visite, nous prenons
des
photos, mais nous n’avons pas le courage d’entreprendre une
quelconque restauration. |
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Le
break DS était un vieux rêve. Malheureusement, leur cote a
grimpé
aussi haut et rapidement que le CAC 40 à la fin des années
1990.
J’ai déjà suffisamment de voitures et je ne veux pas mettre
énormément d’argent dans un modèle que je possède déjà en
berline. Quel dommage d’avoir si mal stocké ces autos.
D’autant
plus que ce break est un deuxième nez, mon préféré.
Les
jours passent et je n’arrive pas à me sortir cette voiture de
la
tête. Tout cela fait beaucoup rire Pascal, mon épouse un peu
moins.
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Une
semaine plus tard je reprends contact avec les vendeurs. Je
repasse
voir la voiture avec un nouvel œil, j’amène mon ordinateur
afin
de leur présenter mes autres véhicules restaurés, le contact
passe
bien.
Je
négocie l’ID break, la berline et le stock de pièces pour
moins
de mille euros.
Me
voici donc propriétaire d’épaves et d’un stock dont je n’ai
aucune idée de quoi faire avec et surtout où le stocker.
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Le
break est une version ID confort de 1963, même année que ma
berline
mais immatriculé fin 1963, donc en millésime 1964. Il s’agit
d’un
break confort, avec ses strapontins non pas dans le coffre
mais, pour
l’instant, sur le toit. |
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Quant
à la berline, nous ne savons pas réellement de quel modèle il
s’agit. Les vendeurs ne retrouvent plus la carte grise.
J’envoie
des photos à des amis spécialistes : Bernard, Roberto, Yvon.
Sans avant car le véhicule a été accidenté, ils penchent pour
une
DSpéciale ou DSuper.
Quelques
temps plus tard, la carte grise sera retrouvée, les
spécialistes
ont vu juste : il s’agit d’une DSpéciale de 1971.
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Mon
pote Bernard, grand restaurateur d’ancienne, toujours à
l’affût
d’une prochaine perle à restaurer, semble très intéressé par
cette berline. Mais voilà, Bernard est un « taiseux ».
Difficile de savoir réellement ce qu’il pense. De plus, il
doute
sérieusement, au vu des photos, de la possibilité, ou non, de
s’en
servir de base de restauration. Bernard étant désigné d’office
pour la sortie de cette grange, nous décidons de nous rendre
sur
place histoire de voir un peu mieux l’étendue des dégâts.
Les
véhicules sont difficilement accessibles. Ils servent d’espace
de
stockage, il y a des billots de bois de près d’un mètre de
circonférence juste derrière la berline, du bois coupé tout
autour
du break, des morceaux de ferraille dessus, devant, derrière,
c’est
une horreur. Nous mitraillons et décidons d’aller déjeuner
histoire de réfléchir le ventre plein.
Il
ne faudra pas attendre le dessert pour que Bernard donne sa
réponse :
il la prend.
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Nous
avons convenu, avec les vendeurs, de nous recontacter courant
mai
pour enlever ces épaves, cela me laisse un peu de temps pour
savoir
quoi faire du break. En effet, hors de question pour moi de
traiter
deux chantiers en parallèle et la SM sortie de grange en
février
n’est toujours pas sur la route. A chaque jour suffit sa
peine,
trouvons un endroit de stockage. |
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Vu
l’état de ce break, il est évident que ce stockage doit se
faire
gratuitement, ce qui complique légèrement la chose. Lors d’une
livraison de pièces Jaguar pour le compte du célèbre GPTO,
grand
désosseur de Jaguar devant l’éternel, je rencontre un mécano
installé depuis peu. Il est jeune, il a de la surface de
stockage,
il faut lui laisser une chance. Ce que je demande n’est pas
extraordinaire, dans un premier temps je me contenterai de
revoir
l’allumage, la carburation, l’hydraulique et les freins. Tout
le
reste demeurera en l’état, j’ai l’intention de rouler, au
grand damne de ma petite famille, tel que. Nous dealons sur le
champs. Je lui envoie quelques photos pour être sûr qu’il ait
bien compris l’état réel de la voiture et sa réponse est
claire : il est emballé par ce chantier. Dont acte. |
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Voici
donc la première partie de cette aventure. Il faut tout de
même
espérer que ce break est sauvable. Nous en saurons plus
courant mai,
lors de la sortie de grange. |
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Maintenant,
rendons à César ce qui est à César. Pourquoi « Sauvez
Willy » ? Vous aurez fait le rapprochement avec le célèbre
film. Et oui, nos breaks ressemblent à des grosses baleines ou
cachalots. Cette expression n’est pas de moi mais de Roberto
(Toto
pour les intimes). Toto est l’heureux propriétaire d’une 19
Pallas de 1965 mais aussi de Willy 1er, un break DS de 1972. |
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